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11 décembre 2012 | Turquie

Turquie : une avocate qui dénonce les mariages de fillettes est inculpée pour insulte à l’islam

Source : Silencing women’s rights activists in Turkey, par Bingul Durbas, OpenDemocracy, 10 décembre 2012. Extrait traduit par Poste de veille

Canan Arin, avocate et militante de premier plan pour les droits des femmes en Turquie, a été illégalement détenue le 23 juin 2012 pour avoir dénoncé les mariages d’enfants. Pendant que son procès se poursuit, elle vit sous la menace permanente mais refuse de se taire. Dingul Durbas l’a interviewée.

Bingul Durbas : L’Association du Barreau d’Antalya vous a invitée en tant qu’avocate et formatrice à parler de la violence faite aux femmes. Après votre présentation, vous avez été arrêtée. Que s’est-il passé ?

Canan Arin : Je suis co-fondatrice du Centre pour la mise en application des droits des femmes de l’Association du Barreau d’Istanbul et j’y ai travaillé comme formatrice. L’Association du Barreau d’Antalya ouvrait un Centre pour la mise en application des droits des femmes et les avocats avaient besoin de formation. Dans le cadre de cette formation, j’ai donné une conférence sur les mariages précoces et les mariages forcés comme formes de violence envers les femmes. J’ai utilisé deux exemples pour illustrer mon propos. Le premier est celui du prophète qui a épousé une fillette de sept ans. Le second est celui du Président de la République turque : son épouse, la Première dame, avait 14 ans lors de leurs fiançailles et 15 ans lors du mariage. Ce sont des faits.

Pendant que je parlais, des jeunes hommes se sont levés et ont commencé à crier après moi. Ils disaient que mes propos étaient insultants et hors sujet. J’ai nié, et je leur ai dit qu’ils étaient libres de quitter la salle de conférence, ce qu’ils ont fait. Le lendemain, un autre groupe de jeunes hommes (je ne suis pas certaine que c’était des avocats) ont tenu une conférence de presse et m’ont dénoncée à la cour en m’accusant d’avoir insulté le prophète et le Président de la République de Turquie. Ce groupe d’une dizaine d’hommes qui ont déposé une plainte contre moi n’avaient pas assisté à ma conférence.

J’ai été inculpée pour avoir avili les valeurs religieuses d’une partie de la population (Code pénal turc, article 216/3) et avoir insulté le Président de la République (Code pénal turc, article 299/1). … Dans l’acte d’accusation, le procureur utilise l’acronyme « PSSL» (paix soit sur lui) quand il écrit le nom du prophète Mahomet dans un document juridique. Un procureur ne peut inclure ce genre de qualification dans les documents juridiques. Cela démontre son manque d’impartialité dans ma cause.

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