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7 septembre 2016 | État Islamique

« Daesh » n’est pas l’acronyme de l’Etat Islamique (Wassim Nasr)

maxresdefaultDans son excellent livre-enquête Etat Islamique, Le fait accompli (Plon, 2016) l’expert en islamisme et journaliste de France 24 Wassim Nasr fait une mise au point sur cette « guerre sémantique » appuyée par l’Elysée aux journalistes afin d’occulter la nature réelle de l’Etat Islamique :

« Les décideurs occidentaux, à Paris, Londres et Washington, se sont très vite mis d’accord sur un point concernant l’Etat Islamique : il fallait lui nier toute prétention islamique et étatique. Pour Obama, Hollande et Cameron, l’EI n’a « rien d’islamique et rien d’un état non plus ». C’est pour aller dans ce sens que, dès septembre 2014, les chancelleries ont adopté le mot « Daesh ». Les autorités françaises franchissent les premières ce palier dans la guerre sémantique, en adoptant officiellement ce qu’ils appellent un acronyme arabe, « Daech », pour désigner l’EI. L’ancien ministre des Affaires étrangères, Laurent Fabius, appelle les journalistes à bannir les mots « Etat » et « islamique » dans leur description ou désignation de l’EI. (…) Mais est-ce vraiment un simple acronyme arabe de l’Etat islamique en Irak et au Levant (al-Dawla al-Islamiya fi al-Irak wa ash-Sham ou EIIL), ancêtre actuel de l’Etat Islamique ?

Nombre de journalistes, d’observateurs et de commentateurs pensent que le mot « Daesh » est un acronyme arabe pour désigner l’EI. Mais c’est faux. (…) Cette appellation a été lancée peu après l’annonce de la création de l’EIIL le 9 avril 2013. D’abord sur les réseaux sociaux puis par les médias hostiles au groupe, parmi lesquels la chaîne saoudienne Al-Arabiya ou d’autres chaînes ou sites d’information iraniens, syriens, égyptiens etc. (…)Pourquoi ce choix sémantique ? Le mot ou l’expression, considérée comme péjorative par les djihadistes, n’existe en fait pas dans la langue arabe. Mais d’autres mots, phonétiquement, oui. A l’instar de Daes –celui qui écrase avec le pied-, ou de Dahes-, celui qui sème la discorde ou la zizanie. (…) Le but recherché par tous les acteurs, dans les deux camps qui se battent sur le terrain, est justement d’occulter la nature islamique et les ambitions étatiques de cette nouvelle entité qui bouleverse l’ordre régional et menace tous les pouvoirs établis sans exception, n’en déplaise aux conspirationnistes. » Pages 23-24

9782259248976

Le journaliste de France 24 fait aussi une autre mise au point dans sa Conclusion :

« Si les djihadistes ne sont pas musulmans, comme l’affirment certains, pourquoi chercher des réponses dans un islam de France, ou en formant des imâms républicains ? (…) Et à ceux qui accusent les candidats au djihad d’ignorer l’islam, je pose cette question : Est-ce que tous ceux qui ont rejoint les brigades communistes maîtrisaient l’idéologie marxiste-léniniste ? Un homme peut être emporté dans une idée qui le dépasse sans la maitriser dans le détail. (…) Nier la dimension religieuse du phénomène djihadiste, c’est nier l’essence même de ce qui motive des hommes et des femmes de différentes nationalités et origines à franchir le pas du djihad »

Extraits du livre Etat Islamique, le fait accompli, Plon, 2016. Acheter